Syrte 2009 : Un nouvel échec pour l’unité africaine ?
Par
Francis A Fogué Kuaté
Chercheur assistant au COREDEC
Le 13ème sommet de l’Union Africaine tenu à Syrte (Lybie) (juillet 2009) est une illustration très forte de ce que l’Afrique aura vraiment du mal à s’unir. La problématique de l’unité africaine, vieille aujourd’hui de plus de 40 ans, a du mal à faire l’unanimité parmi les leaders africains. Depuis l’orée des indépendances, deux tendances opposées dans leurs principes, se sont toujours distinguées chaque fois qu’il a été question de débattre de l’unité africaine. Dès le début des années 1960 –plus précisément en 1961- et trois ans seulement après la tenue de la première conférence des Etats africains organisée au Ghana sous les auspices de Kwame Nkrumah , la « sphère politique africaine » a été scindée en deux groupes : le groupe de Casablanca, qui militait en faveur de l’unité politique du continent, et le groupe de Monrovia, favorable à une unité économique graduelle. En 1963, Hailé Sélassié Ier d’Ethiopie, Sékou Touré de la Guinée et bien d’autres leaders, prennent l’initiative de réunir les deux tendances opposées à Addis-Abeba. C’est dans le sillage de cette rencontre que naquit alors l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) regroupant une trentaine d’Etats sur la cinquantaine que compte l’Afrique. Pendant 39 ans, c’est cette organisation (l’OUA), née sur la base d’un consensus, qui a, tant bien que mal, su entretenir l’illusion d’une unité africaine.
Aujourd’hui encore, les vieilles dissensions ont la peau dure. Malgré l’échec affiché de l’OUA, les leaders politique africains, qui ont pourtant la charge d’assurer le bien être de leurs peuples, semblent toujours n’avoir pas pris conscience de ce que l’Afrique doit s’unir comme l’indiqua Nkrumah. L’unité du continent est le seul gage dont l’Afrique dispose pour faire entendre sa voix sur la scène internationale et pour éviter de disparaître dans le tourbillon que constitue la mondialisation. Beaucoup aujourd’hui disent se méfier des intentions du Président libyen qui a eu le mérite de ramener le débat de la constitution des Etats-Unis d’Afrique à l’ordre du jour. Certains langues vont même jusqu’à dire que son objectif inavoué et final serait de réaliser une hégémonie à l’échelle continentale. Sans pour autant prendre position en faveur du Président Kadhafi, cette façon d’aborder la question m’amène à me demander si la création des Etats-Unis d’Afrique est l’affaire d’une seule personne et si les autres 51 leaders africains manquent de matière grise et de poigne pour que le Colonel Kadhafi à lui tout seul devienne « maître du continent ». À mon sens, il est assez simpliste voire même candide de penser ainsi.
L’Afrique doit s’unir avec ou sans le Président Kadhafi. La question ne doit pas être de savoir ce que Kadhafi veut planifier. Les Africains doivent plutôt s’interroger sur le bien fondé de cette initiative. L’unité politique et économique du continent peut-elle être bénéfique pour les Africains dans ce contexte marqué par la toute puissance des économies occidentales et la logique d’impérialisme moderne entretenue par la Chine que viennent progressivement rejoindre l’Italie et la Russie ? Les pays africains peuvent-ils, de façon individuelle et en rang dispersé, continuer à faire à toutes ces pressions étrangères ? Après analyse et observation de l’évolution des pays africains dans leurs rapports avec l’extérieur ces 20 dernières années, on peu très difficilement répondre à cette question par l’affirmative. Alors, que nos chefs d’Etats cessent de privilégier leurs intérêts personnels pour se soucier du devenir de leurs populations et de l’avenir du continent.
Rédigé le 6 juillet 2009
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